Complainte du taureau par Irène Noël

Publié le par Félix


                       Complainte du taureau

J’étais descendu de la belle constellation du Taureau

Croyant que Terre était un havre de songes bucoliques

Je ne savais pas la conspiration rusée des bourreaux

Qui m’avaient désigné comme objet de plaisir sadique

Aux sons stridents des trompettes de la mort

Et dans ma tête le son plaintif du violon qui implore

Je broutais paisiblement le bonheur gonflé de sève

Mais des cavaliers juchés sur la mort s’approchèrent

Des forces brutales me poussèrent sans repos ni trêve

Dans un fourgon bringuebalant sur un chemin solitaire

Aux sons stridents des trompettes de la mort

Et dans ma tête le son plaintif du violon qui implore

Je me suis retrouvé dans un toril sali de noir profond

Le mal de la de peur vrillait l’innocence de mes yeux

Je fus soudain projeté sur une aire de sable nauséabond

Un soleil rouge embrasait les collines du cirque vicieux

Aux sons stridents des trompettes de la mort

Et dans ma tête le son plaintif du violon qui implore

 

Des pandours pailletés dansotaient dans un bal travesti

Meuglant je fonçais sur ces spectres patibulaires

Des bâtons de feu transperçaient ma nuque meurtrie

Ma tête soudain trop lourde perdait tous ses repères

Aux sons stridents des trompettes de la mort

Et dans ma tête le son plaintif du violon qui implore

Une coulée de lave visqueuse glissait sur ma souffrance

Mes flancs haletaient de colère contre ma profonde misère

Mes sabots soulevaient le sable rouge comme la sentence

Et dans mon garrot se fichait la violence de harpons d’enfer

Aux sons stridents des trompettes de la mort

Et dans ma tête le son plaintif du violon qui implore

Un clown vêtu de noir soleil cruel transperçait mes  poumons

Le sang par saccades engorgeait ma gorge et mes naseaux

Le liquide sirupeux ruisselait en traînées sur le sable du démon

Pitié je vacille titubant en staccato jusqu’à mon ultime sursaut

Aux sons stridents des trompettes de la mort

Et dans ma tête le son plaintif du violon qui implore   

J’ai bu jusqu'à la lie amère la coupe des supplices aigus

Barcelone se recueille dans le Requiem inachevé de Mozart

Mais loin de Dieu qui a rejoint la horde des anges déchus

Reviendra se repaître de la valse lente des martyrs hagards

Aux sons stridents des trompettes de la mort

Et dans ma tête le sanglot déchirant du violon qui implore

                                                          IRENE NOËL

Professeure

CH - Montreux

déléguée du CRAC EUROPE pour la Suisse

 

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A
Belle complainte pour un taureau, il faudrait qu'un compositeur l'habille de musique et nous aurions un hymne pour marcher dans les rues de Nîmes, Arles, Montpellier...<br /> Merci à la poétesse.
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